L’océan peut inspirer comme effrayer. Beauté infinie dans des dégradés subtils de bleu ou immensité déstabilisante aux profondeurs mystérieuses ? Douceur des vagues comme un murmure poétique et apaisant ou déchainement chaotique des flots ? L’océan peut être tout à la fois, incontrôlable et imprévisible. Quand Kô se trouve face à lui, sa première envie est de fuir ce lieu, de ne plus l’avoir devant les yeux, et pourtant…
Kô a 16 ans, il a abandonné le lycée pour travailler sur la plage. Chaque jour, il ramasse tout ce que les courants déposent, et selon ses trouvailles, il conserve les objets ou les vend. Son monde s’est arrêté trois ans auparavant, et depuis il ne vit qu’à moitié. Son père, pêcheur est parti un jour en mer, et il n’est jamais rentré ; laissant auprès des siens un grand vide. Nila son épouse et Sindhu sa fille cadette ont accepté la désolante nouvelle et continuent de vivre malgré tout ; mais Kô n’a jamais accepté le décès de son père. Chaque jour, il espère son retour et guette des signes du destin pour faire perdurer cet espoir. Difficile pour lui de comprendre pourquoi sa mère a revêtu pendant trois ans le sari du deuil et comment sa sœur de 13 ans goûte à la légèreté et l’insouciance de l’adolescence.
Il se sent tellement seul face à son intuition et sa persévérance lui coute. Il ne peut se résigner à accepter l’évidence car souvent des détails lui redonnent la force d’y croire, comme ce bijou en forme de libellule trouvé sur la plage. L’insecte lui rappelle spontanément un chaleureux souvenir d’enfance en compagnie de son père.
Jusqu’au jour où il trouve un gilet de sauvetage et une petite valise bleue… Une part de lui y voit encore un signe, le bleu étant la couleur préférée de son père, mais une faille apparaît lorsque quelques jours plus tard, une aile d’avion est retrouvée au même endroit…
Kô, Sindhu et Nila prennent la parole chacun à tour de rôle, nous ouvrant la porte de leur monde. Joëlle Ecormier nous invite ainsi dans l’intimité de ce foyer fragilisé, au cœur de leurs traditions et habitudes sur l’île de la Réunion. Par sa plume imagée et littéraire, l’autrice raconte avec sensibilité la reconstruction lente et douloureuse d’un adolescent en perte de repère. À travers ce court roman choral sur le deuil, elle aborde aussi la force du temps, le pouvoir des rêves et de l’espoir, l’importance du soutien des proches et le respect de la capacité de chacun de rebondir à sa manière.
Ce roman est comme un petit objet précieux tant dans sa fabrication que par le texte. Par sa langue délicate et mélodieuse, Kô pointe notre vulnérabilité face à des événements amers tout en faisant jaillir la beauté de la vie.
Kô
Joëlle Ecormier
Zébulo Éditions
112 pages – 9791096163175 – 11€
parution le 17 novembre 2020
> à partir de 13 ans
Une réflexion sur “Face à l’océan, Kô”
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