Comme tous les étés, Abel et son frère Jo passent leurs vacances chez leurs grands-parents. Ils y retrouvent cousins et amis avec qui ils passent leurs journées. Mais cette année, tout change. Cela fait deux ans que Jo est en internat et la distance s’est installée entre les deux frères. Jo est tout le temps de mauvaise humeur, a des copains qui font des saluts nazis en classe, griffonne des croix gammées… Quant à Abel, il est tombé amoureux d’un garçon, un camarade de classe, et révèle son homosexualité à toute la bande d’ados, y compris à son frère, qui est incapable de l’accepter.
Théâtre de l’intime à la part autobiographique, Ronan Mancec nous fait entrer dans la relation complexe qui unit deux frères, une relation profondément meurtrie par la séparation. La citation extraite de la Bible en début du livre, tirée de l’histoire de Caïn et Abel, et la toute première scène de la pièce donnent tout de suite le ton. Le déchirement, le refus de l’autre, la violence des mots et des intentions qui peuvent tuer plus durement que les coups, mais aussi la solitude, la difficulté de la séparation, autant d’émotions d’une grande intensité qui animent la relation de ces deux frères qui sont devenus des étrangers l’un pour l’autre.
1.
ABEL. – Quand mon frère m’a tué
Je lui ai dit S’il te plaît
Ne me tue pas s’il te plaîtTemps
Mon frère a ri, bien sûr
Il a dit qu’il me tuerait dorénavant aussi souvent qu’il le voudrait
A partir de maintenant je te tuerai aussi souvent que je le veux
Moi je me suis levé et j’ai fait un pas vers la porte
Il a dit
Qu’est-ce que tu fais ?
Ne pars pas
Je n’ai pas fini de te tuerTemps
Alors je me suis assis
Ce temps des vacances leur permettra-t-il de s’apprivoiser, de se retrouver ? De se comprendre et de s’accepter tels qu’ils sont ? Le texte de Ronan Mancec est tout en subtilité, en poésie, et le côté très sombre et violent de cette relation est contrebalancé par ce temps ramassé des vacances à la campagne qui offre de jolis moments estivaux et de complicité entre les deux frères. Des instants de pure insouciance de l’amitié et de l’adolescence, entre ennui complet, discussions amoureuses et défis, qui donnent également corps à ces personnages d’adolescents et montrent toute la justesse de l’écriture de Ronan Mancec.
Un texte délicat et sensible sur la relation complexe entre deux frères devenus étrangers. Et un hymne à la vie, à l’espoir et à l’acceptation de l’autre.
Le Gardien de mon frère
Ronan Mancec
Théâtrales Jeunesse
96 p. – 9782842608248 – 8€
parution le 13 février 2020
> dès 13 ans