Cécile Burgard s’occupe des poches aux éditions Pocket Jeunesse. Elle a répondu à nos questions pour nous parler de son métier passionnant qui donne une seconde vie aux romans PKJ et qui part à la découverte de pépites parues chez d’autres éditeurs de grand format.
Pouvez-vous nous décrire votre travail en quelques mots ?
Je suis l’éditrice en charge des reprises poche chez Pocket Jeunesse depuis 2016. C’est un marché qui s’est beaucoup développé ces 5 dernières années, après une période d’environ 10 ans pendant lesquels le grand format avait une place prépondérante en littérature jeunesse. Aujourd’hui, grand format et poche sont complémentaires. L’édition poche est publiée lorsque les ventes grand format commencent à décliner, et dans le cas de séries en cours de publication, permet de faire connaître une série à de nouveaux lecteurs qui liront la suite en grand format. Mais de manière générale, le grand format a une durée de vie plus longue en jeunesse qu’en littérature générale. On attend souvent deux ans pour passer un titre en poche, voire plus dans le cas de très gros succès.
Au sein de nos collections de reprises poche, nous distinguons les « Best-sellers », regroupant tous les ouvrages ayant dépassé 15 000 exemplaires en grand format, et les titres « Trésor de lecture », qui sont prescrits en classe. Cependant, un ouvrage qui ne rentre dans aucune de ces catégories peut très bien faire un succès en poche, parce que sa pagination ou son thème sont adaptés, parce qu’il a été publié en grand format par un petit éditeur, et qu’il n’a pas encore rencontré son public, ou alors parce qu’il va intéresser les professeurs d’élémentaire ou de collège.
Quoi qu’il en soit, il n’y a pas de règle absolue, et bien qu’on s’appuie beaucoup sur des raisonnements rationnels, les ressorts qui fondent un succès, en poche comme en grand format, nous échappent parfois. Et c’est ce qui fait le sel du métier !
A l’occasion des 25 ans de Pocket Jeunesse, vous avez relooké des romans phare PKJ, avec 11 poches remis au goût du jour ! Sans oublier le rechartage des ouvrages de la collection « Mythologies ». Un résultat très réussi ! Votre travail de sélection ? Parlez-nous de votre collaboration avec les services de fabrication et de PAO.
L’édition de ces collectors a été une expérience très riche, qui nous a permis de travailler avec tous les services transversaux sur des projets pensés sur-mesure. Un véritable luxe ! Nous avons sélectionné les titres selon deux axes : des ouvrages patrimoniaux, littéraires et étudiés en classe d’une part, et des romans qui ont remporté un très grand succès public d’autre part. Nous nous sommes mis d’accord avec le service commercial et marketing sur le format, la gamme de prix et un tirage approximatif. Pauline Ricco, notre directrice artistique, a confié nos briefs de couvertures à des graphistes dont le travail nous a bluffés. Nous avons ensuite fait plusieurs réunions avec le service artistique, notre fabricante et notre maquettiste pour réfléchir aux enrichissements possibles sur les couvertures : cold foil, marquage, gaufrage, découpe…
C’est très agréable de mettre en commun les idées et les énergies au profit d’ouvrages que nous aimons tous, et sur des projets qui changent de l’ordinaire. Quitte à se faire de petites frayeurs en phase de fabrication, car les délais étaient serrés. Et quelle joie de découvrir les premiers exemplaires, tout juste sortie de l’imprimerie, puis de les voir en librairie !
Un roman que j’avais beaucoup aimé va sortir en poche : Seuls dans la ville, paru chez Syros en 2011. Pouvez-vous nous parler de ce choix ? de votre lecture ? ce qui vous a plu dans le roman ?
Moi aussi, j’aime beaucoup ce roman. Je l’ai lu en 2012, juste après avoir dévoré les trois tomes de Méto. Et j’ai été fascinée : Yves Grevet change de genre et d’univers avec une telle aisance ! Après le souffle parfois terrifiant de l’uchronie, Seuls dans la ville était une petite pépite de malice et de finesse. C’est un court polar, mais au-delà de l’enquête sur un crime, c’est aussi une enquête sur le discours. Et les profs de français ne s’y sont pas trompés. Le publier en poche était une évidence, parce qu’il a toutes les qualités pour être étudié en classe, parce que nous adorons l’auteur (dont nous publions également U4 Koridwen en juin) et que ce texte-là est un petit bijou.
Quel est votre prochain coup de cœur au second semestre ?
Un seul coup de cœur ? C’est trop réducteur ! Il y a beaucoup d’ouvrages que nous sommes très heureux de publier en poche d’ici la fin de l’année. Mais s’il faut faire un choix personnel, je dirais que les deux parutions du second semestre qui me font le plus plaisir sont le premier tome de Phobos de Victor Dixen, et Eleanor&Park de Rainbow Rowell. Phobos est une série palpitante, addictive, entre la dystopie, la romance et le space opera. Eleanor&Park, au contraire, est une histoire d’amour irrésistible, tout en délicatesse, et sa bande-son des années 80 a un charme fou ! Ces deux romans sortent en poche en novembre, et je les attends avec impatience.
Un scoop pour 2020 ?
Nous sommes justement en train de travailler sur le programme 2020. Il est un peu tôt pour en parler, d’autant que nous le peaufinons encore, mais je peux lever le voile sur une des premières parutions de l’année, qui est aussi un coup de cœur. Nous sommes heureux de publier, en janvier 2020, le premier tome d’A la place du cœur, d’Arnaud Cathrine, une trilogie Jeunes Adultes dans laquelle se mêlent les séismes de l’Histoire contemporaine et les bouleversements de l’adolescence. Un récit sous tension et d’une bouleversante justesse sur l’amour, le désir, l’engagement, la colère dont l’action se situe entre janvier et novembre 2015. Un texte essentiel.
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